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Sus scrofa
Les Suidés

Classe :

Mammifères

Ordre :

Cétartiodactyles

Sous-ordre :

Suinés

Famille :

Suidés

Espèce :

Sus scrofa

Identification :

Seul suidé sauvage d’Europe. Il se reconnaît par ses longs poils très rêches appelés les soies. Le pelage des adultes est souvent sombre avec des oreilles triangulaires poilues et dressées sur la tête. Les canines sont très développées surtout chez les mâles. Celles de la mâchoire supérieure sont appelées les grès.

Taille :

64 à 109 cm au garrot pour les mâles.
59 à 89 cm au garrot pour les femelles.

Poids :

Poids moyen de 30 à 100 kg.

Répartition :

Se retrouve dans toute l’Europe et l’Asie.

Régime alimentaire :

Omnivore avec une grande majorité de racines et de fruits divers. Il affectionne également les glands, faines, châtaignes, maïs et autres céréales. La partie carne de son alimentation ne représente que 5 à 10% avec des insectes, des petits rongeurs, des carcasses, des oiseaux nichant à terre etc.

Structure sociale :

Les mâles sont généralement solitaires, sauf pendant le rut. Les femelles forment des “compagnies” avec des marcassins (jusqu’à 3 mois) et les jeunes (jusqu’à 6 à 8 mois pour les mâles).

Maturité sexuelle :

1 an. Mais les jeunes mâles ont souvent des difficultés à se reproduire car exclus par les individus plus matures.

Période de reproduction :

Novembre-Mars

Durée de gestation :

3 mois, 3 semaines et 3 jours

Nombre de jeunes par portée :

3 à 10 petits par portée

Poids à la naissance :

Entre 0.60 à 1 kg

Longévité :

10 ans et plus en captivité

Effectifs, tendance :

Plus d’1 million d’individus recensés en France, hors parcs et enclos.

Une espèce au vocabulaire fourni…

La relation entre l’Homme et cette espèce est si ancienne et si étroite, de la chasse à sa domestication, qu’elle a engendré un vocabulaire particulièrement riche et précis.

Les mâles sont appelés « sangliers », les femelles des « laies », les petits des « marcassins ». Les marcassins, adorables petites boules rayées pesant à peine plus de 1 Kg à la naissance, ont tendance à changer de robe à partir de l’âge de 3 mois, abandonnant les rayures pour aller vers un pelage uniforme roux. Ils sont alors appelés bêtes rousses jusqu’à l’acquisition de la robe adulte définitive plutôt grise et noire vers les douze mois.

Au cours de ses pérégrinations, le sanglier laisse de nombreuses traces dans son environnement qui permettent d’affirmer sa présence. Citons :

Le chaudron : une excavation plus ou moins aménagée dans la végétation basse où la laie met bas (de 2 à 8 petits). La gestation dure 3 mois, 3 semaines et 3 jours. Le nombre de petits semble corrélé au poids et à la santé de la femelle. L’allaitement dure 3 à 4 mois.

La bauge : gîte où l’animal se repose de préférence dans les zones les plus fourrées et bien exposées.

La laissée : excrément du sanglier adulte formé de plusieurs éléments de 5 cm de diamètre associés entre eux, plus ou moins agglomérés.

Le boutis : zone de sol retourné comme labouré, où l’animal cherche sa nourriture.

La souille : lieu humide où le sanglier se roule pour se débarrasser des parasites externes.

Le frottoir : après la souille, le sanglier aime se frotter contre les arbres (proches du lieu de souille) sur lesquels il laisse des traces de boue.

L’housure : une trace ou accumulation de boues sèches ou fraîches sur différents supports où le sanglier est venu se frotter après son bain de boue. Généralement situées à proximité de la souille, elle peut être éloignée de plusieurs centaines de mètres de celle-ci.

De très nombreux autres termes sont utilisés en fonction des régions et des patois locaux.

 

Et à l’histoire ancienne…

L’aire de répartition du sanglier s’étend de l’Europe occidentale jusqu’’à la Chine et l’Indonésie, en passant par l’Afrique du Nord.
Le sanglier est présent dans une grande partie de l’Europe depuis des milliers d’années, en France depuis le début du Pléistocène moyen (- 775 000 à – 130 000 ans) !
Représenté dans certaines grottes autour du bassin méditerranéen, évoqué dans des récits de la mythologie grecque, représenté dans les textes de chasse du moyen-âge, il côtoie l’homme depuis très longtemps.
Sa présence dans les Alpes-Maritimes et le Vaucluse est confirmée, par des fouilles, au Paléolithique supérieur, soit de -40 000 à – 9 500 ans !
Cette espèce parait montrer une grande affinité pour les climats tempérés et le sanglier ne finira de conquérir le territoire français qu’au début de l’Holocène soit il y a un peu plus de 10 000 ans. A cette époque, il n‘existe sur Terre que des cochons sauvages !

Une dynamique des populations en dent de scie en Europe !

Du XVème au XVIIème siècle, les populations de sangliers vont fluctuer entre rares et très abondantes au gré des conditions écologiques des forêts. Entre le début du XVIIème et la fin du XVIIIème siècle, un peu partout mais surtout en France, des sangliers d’élevage et des hybrides sangliers d’élevage / cochons domestiques vont être introduits dans les forêts nationales pour populariser une activité, jusqu’alors réservée aux nobles et à la royauté : la chasse.
Ces introductions seront, malgré tout, très sporadiques et n’impacteront pas significativement les dynamiques sauvages.
Au milieu du XIXème siècle, les populations repartent à la hausse partout en Europe.

Mais aussi en France…où les effectifs explosent

A la fin du XVIIIème siècle en France, la chasse est tellement populaire que les sangliers disparaissent quasiment des forêts françaises. Au cours du XIXème siècle, les effectifs remontent mais pas de façon homogène, l’espèce étant repoussée vers les zones forestières.
La disparition des prédateurs comme le loup et le lynx dans la première moitié du XXe siècle explique en partie la croissance de ses populations, renforcée par l’arrêt de la chasse pendant la seconde guerre mondiale.

Mais la dynamique des populations de sangliers en France va prendre un tournant décisif pendant la décennie 1960/70, sous l’effet de multiples facteurs anthropiques :

  • lâchers de sangliers d’élevage et d’hybrides associés dans les années 70,
  • fertilité accrue des adultes,
  • modification des forêts, avec plantation abondantes de chênes et de hêtres, qui attirent plus les sangliers que les forêts de pins,
  • réduction des territoires naturels du sanglier et partage forcé de ces territoires avec un hybride, le cochonglier,
  • compétition pour les mêmes ressources alimentaires entre sangliers et cochongliers,
  • disparition des prédateurs,
  • apparition d’immenses champs agricoles à l’orée des forêts,
  • changements climatiques qui engendrent des hivers plus doux, donc moins de mortalité chez les marcassins,
  • disparition du petit gibier et introduction du sanglier en remplacement.

Tous ces facteurs ont abouti à une augmentation significative des effectifs de cette espèce. Dans le même temps les espaces sauvages se sont réduits, la croissance démographique humaine obligeant au défrichement pour bâtir des villes ou accroitre ses surfaces agricoles.
La réduction des territoires sauvages a pour conséquence le conflit d’usage que nous connaissons, aussi bien en zones forestières avec le développement de la sylviculture qu’en zones agricoles avec des dégâts chiffrés à 60 millions d’euros en 2022.

Le sanglier est une espèce remarquable, ubiquiste aux capacités d’adaptation très élevées. Il serait temps que l’humanité prenne des mesures pour désamorcer ces conflits et réserve 30% de ses territoires au Sauvage comme le prévoit d’ailleurs l’accord de la Cop 15 de Montréal (décembre 2022)!

 

Le sanglier, un jardinier redoutable

La nourriture du sanglier est particulièrement variée. Véritable omnivore, il s’attaque aussi bien aux racines, bulbes, fruits, herbages qu’aux larves d’insectes, œufs et parfois cadavres d’animaux.

Cette pratique lui vaut d’être l’animal mal aimé des agriculteurs ! Et pourtant, les sangliers jouent un rôle essentiel dans le bon fonctionnement des écosystèmes forestiers européens.
Le sanglier est en quelque sorte le jardinier sauvage des forêts. En retournant le sol avec son groin (nez) pour rechercher sa nourriture, le sanglier laboure les sols des forêts.
Cette action mécanique (le fouissage) entraîne plusieurs conséquences favorables à la dynamique des sols :

  • Aération et oxygénation entrainant une augmentation de l’activité microbienne des sols et celle de la production de matières organiques végétales (biomasse).
  • Perméabilisation des sols, favorisant la pénétration en profondeur des eaux de pluies et l’hydratation à long terme de la végétation,
  • Reduction significative du ruissellement et du lessivage des sols lors de forts épisodes pluvieux,
  • Dissémination des pollens et graines accrochés aux poils au cours de leurs déplacements. Grace à ce transport, plusieurs dizaines d’espèces végétales peuvent ainsi coloniser de nouveaux espaces. Ce phénomène est appelé « épizoochorie ».

 

C’est aussi un animal à la sociabilité développée

Le sanglier, à l’exception des mâles adultes, est un ongulé qui forme des groupes sociaux, appelés compagnies, composées de femelles, de jeunes marcassins à livrées rayées et de bêtes rousses âgées de plus de six mois.

Ces groupes mixtes sont le plus souvent dirigés par une meneuse (femelle la plus âgée), les mâles en âge de reproduire ayant tendance à quitter les compagnies pour devenir solitaires. Les laies d’une même compagnie créent, comme chez le bison d’Europe, des crèches où les marcassins de l’année sont élevés et protégés par les femelles adultes qui acceptent d’allaiter, à tour de rôle, la marmaille de la compagnie.

La reproduction se déroule en hiver, de novembre à janvier même si des études récentes tendent à montrer que les changements climatiques engendreraient de plus en plus d’épisodes de saillies n’importe quand dans l’année.

Les mâles se livrent alors à des combats relativement violents afin d’obtenir les faveurs des femelles.

Sur la Réserve, les mises-bas ont plutôt lieu en fin d’hiver (février-mars) après une gestation de 17 semaines environ. Les petits naissent dans un « nid », appelé chaudron, que la mère a soigneusement confectionné à partir de chaumes récoltés aux alentours.

 

Très anciennement domestiqué par l’homme

La domestication du sanglier aurait démarré aux alentours de 8500 ans avant J.-C. en Turquie et le porc aurait été introduit en France dès le milieu du 6e millénaire avant J.-C.
Cependant, l’origine de la domestication du sanglier ne fait pas l’unanimité et aujourd’hui, encore, deux théories s’affrontent :

  • TOUS les cochons proviendraient du sanglier eurasiatique (Sus scrofa), domestiqué il y a 9 000 ans en Asie Mineure et dans la région du Turkestan,
  • OU ils auraient 2 origines différentes : les cochons d’Europe, d’Afrique, d’Amérique et d’Océanie proviendraient de la domestication de Sus scrofa (- 9 000 ans) et les cochons d’Asie Mineure et d’Asie du Sud-Est de celle du sanglier nain d’Asie du Sud-Est (Sus vittatus. – 8 000 ans).

Pour l’anecdote, le cochon domestique a été introduit en Amérique du Nord par Christophe Colomb lors de son second voyage en 1493.