Le Mouflon (Ovis gmelinii)
Pour nous, le mouflon (Ovis gmelini) est un mouton sauvage originaire de Chypre et du pourtour de la Mer Caspienne (Azerbaïdjan, Iran, Géorgie, Arménie ainsi que l’est de la Turquie).
Région où il a été pré domestiqué au cours du Mésolithique ( -12 000 à – 6 000 ans) puis exporté dans pratiquement toutes les iles méditerranéennes dont la Sardaigne et la Corse.
Chez l’adulte, le dimorphisme sexuel est marqué, essentiellement par la taille des cornes. Volumineuses et enroulées en spirale, elles peuvent atteindre plus d’un mètre chez le mâle tandis que la femelle porte des cornes courtes et aplaties de moins de 20 cm.
D’un poids compris entre 25 et 50 kg pour une hauteur au garrot avoisinant les 70 cm, le mouflon est un athlète qui dispose d’une musculature puissante lui permettant des vitesses de pointe de 60 km/h.
En hiver, les mâles ont un pelage brun chocolat et un sous-poil laineux leur assurant une bonne protection contre le froid ; celui des femelles est plus clair variant du marron au beige. En été, les 2 sexes arborent une robe pratiquement identique : poil ras tirant sur le roux.
Le Mouflon des Alpes, une espèce d’abord présente en corse…
Au néolithique, l’homme a introduit en Corse des mouflons domestiqués, en provenance d’Anatolie.
Certains individus sont, alors, retournés à l’état sauvage pour donner naissance aux populations actuellement connues, présentes l’une en Haute-Corse autour du Monte Cinto (600 individus), l’autre plus au sud sur les Aiguilles de Bavella et communes voisines (500 individus).
Au total, la population de mouflons est estimée à environ 1 100 individus.
Le Mouflon corse (Ovis gmelini musimon var. corsicana) est également présent sur le continent. Plus précisément à Cadarache (Bouches-du-Rhône) dans la forêt domaniale (150 individus) ainsi que dans un parc fermé géré par l’OFB (50 individus). Ces 50 individus sont la seule population pure de France continentale.
…puis un peu partout sur le continent
Dès le 16ème siècle, le mouflon, en provenance de Sardaigne, est relâché en Italie, puis en Autriche.
En France, il faudra attendre le début du XIXe siècle pour que l’espèce soit représentée dans les Alpes, en Savoie, à la demande de la Capitainerie (officier qui s’occupait alors de la chasse). Les animaux lâchés provenaient de Corse, peut-être pour certains de Sardaigne (?).
La pression de chasse étant forte, il fallut procéder à une deuxième campagne de réintroduction à partir de 1930. Pas seulement dans les Alpes mais aussi dans le Haut-Languedoc (Montagnes du Caroux et de l’Espinouse), le Massif central (Cantal, sud Aveyron), les Pyrénées, et plus au nord la Somme, les Ardennes et l’Oise.
Selon l’ONCFS, le mouflon est, aujourd’hui, présent dans 23 départements et les prélèvements dépassent les 3 000 têtes par an.
Malheureusement, ce développement spectaculaire s’est accompagné de nombreuses hybridations, en particulier avec des ovins domestiques pour augmenter la taille du cornage. Raison pour laquelle les scientifiques ont souhaité distinguer le Mouflon Corse (« population naturelle ») du Mouflon méditerranéen présent sur le continent, issu de croisements avec les ovins domestiques.
La population actuelle dépasse les 15 000 individus.
Le saviez-vous ?
L’espèce est aujourd’hui présente dans presque tous les pays européens, y compris l’Europe centrale.
Une vie sociale en moyenne montagne…
Inféodés aux grands espaces ouverts d’altitude moyenne, plus ou moins accidentés, le mouflon habite les milieux secs rocailleux, couverts de végétation herbacée et arbustive. Il semble ne pas apprécier particulièrement la neige et ne fréquente les forêts qu’exceptionnellement.
Plutôt grégaire, cet animal diurne vit généralement en petits groupes familiaux de cinq à trente individus. Avec d’un côté, les groupes matriarcaux constitués des femelles (les brebis), de leurs jeunes de l’année (les agneaux) et de l’autre les mâles adultes (les béliers). Ces groupes se rejoignent pour le rut en octobre.
Les combats entre mâles peuvent être spectaculaires. Les 2 rivaux prennent plusieurs mètres d’élan puis se percutent violemment, entrainant quelques chaos malgré la bosse occipitale (masse fibreuse) dont il dispose sur l’arrière du crâne pour amortir ces chocs. Les béliers ne sont pas territoriaux et parcourent parfois de longues distances pour trouver leur fiancé.
La durée de gestation est de 5 mois. Les brebis mettent bas à l’écart du groupe, dans des sites abrités qu’elles ont préalablement repérés. En général un petit qui sera allaité les 3 premiers mois.
Le mouflon est un herbivore qui se nourrit principalement de diverses herbacées, de graminées, de jeunes pousses et de feuilles. Mais il ne dédaigne pas les baies, faines ou glands et son régime hivernal comprend aussi différentes écorces et lichens voire des mousses. Pour se nourrir, il parcourt en été les plateaux d’altitude moyenne et descend au fond des vallées l’hiver lorsque la neige tombe.
Compliquée par son origine méditerranéenne
Le mouflon, par son origine méditerranéenne, reste une espèce mal adaptée aux Alpes. A l’aise dans les milieux rocailleux secs, il évite les montagnes enneigées et migre en hiver dans les vallées afin de se préserver des grands froids et de l’humidité.
Il y côtoie les moutons dont il partage une grande partie des maladies parmi lesquelles la coccidiose et diverses strongyloses responsables d’infections intestinales souvent mortelles.
Il est, aussi, régulièrement rapporté des épidémies de kérato-conjonctivite ou encore de piétin qui contribuent à ralentir fortement l’accroissement des populations alpines.
Conservation de l’espèce et législation contestée
Depuis peu, la taxonomie du mouflon est remise en question, ce qui contribue à mettre en difficulté l’élaboration de son statut juridique.
En France, le mouflon est une espèce de gibier inscrite à l’article 1 de la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée. Mais il est également inscrit à l’article 2 de la liste des mammifères terrestres protégés sur le territoire Français. Il s’inscrit également dans la directive Habitats-Faune-Flore à l’annexe II et IV.
De plus, pour l’espèce inscrite sous l’appellation : Ovis gmelinii musimon (Pallas, 1811), l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN) indique que l’espèce est inscrite en annexe II de la Convention de Bonn et en annexe B à la CITES. Le mouflon en France est donc considéré comme une espèce chassable dont l’état de conservation est défavorable et nécessitent des accords internationaux pour leur conservation et leur gestion.